Un seul post en cet an de grâce deux mil seize... Le Gwadiary est-il en hibernation ? Que nenni, fidèle lecteur (tu es toujours là, je le sais) ! Juste une panne d'inspiration, et d'autres activités à côté (genre, le boulot). J'espère pouvoir poster un peu plus souvent en cette fin d'année (allez, on va dire que c'est une bonne résolution de rentrée).
Et quoi de mieux pour marquer ce retour qu'un post littérature ? Je viens en effet de finir Le Cri muet de l'iguane de Daniel Picouly (mais si, ce présentateur télé d'origine martiniquaise qui avait une émission culturelle en deuxième partie de soirée dans laquelle il invitait des personnalités dans un bar parisien ? "Café Picouly" !). C'est aussi un écrivain réputé (plusieurs prix, et non des moindres, à son actif). Celui-là est son dernier roman.
La base de l'histoire est simple : Daniel Picouly revient sur sa généalogie familiale (après avoir parlé de ses parents dans un précédent ouvrage), et en particulier sur son grand-père paternel martiniquais, Jean Jules Joseph Picouly. Cet aïeul est connu dans la famille pour être un héros de 14-18. Mais... mais est-ce la vérité ? Où sont les documents pouvant prouver tout cela ? L'auteur s'est ainsi livré à un travail de recherche sur ces Martiniquais ayant participé à la Grande Guerre, pour trouver des traces de son grand-père. Et il est allé de surprise en surprise, le récit ménageant au lecteur pas mal de péripéties passionnantes.
Je me disais : "Encore une énième histoire de généalogie de famille antillaise "an tan lontan", comme on en voit trop souvent chez les auteurs martiniquais comme guadeloupéens !" Mais je me suis assez vite rendu compte que ce roman avait une véritable originalité, et une personnalité propre. La narration tout d'abord ; l'angle de la guerre de 14-18, plutôt intéressant ; le style de l'écrivain que j'ai beaucoup apprécié (il aime les formules qui font mouche ! Et elles font mouche !) ; son regard sur la Martinique du début du siècle et sur cet aïeul finalement éloigné et pas assez connu... Vivement conseillé ! Le petit extrait traditionnel :
"En ce temps où on envoie au massacre sans honte ni discernement, des homme sont dispensés de guerre : les pères de six enfants et plus. Ce privilège de braguette provoque en Martinique une fulgurante épidémie de reconnaissances impromptues. Un prurit saisit des étourdis soudain pris de remords. La mémoire leur revient. Ils ont oublié de reconnaître leurs enfants. Ces pauvres hères s'en vont bourrelés d'un peu d'argent et de beaucoup de rhum frapper aux portes des voisines pour confesser leur paternité à des femmes qu'ils ne connaissent pas même de vue, à propos d'enfants qu'ils n'ont jamais croisés. Il ne faut que six enfants, mais certains reconnaissants dépassent ce seuil, par précaution ou par esprit de compétition. Il naquit de véritables champions de cette forme de lapinisme rétroactif."