"En écrivant, je rêve à ces présences que je découvre en moi, mon esprit est instable, fuyant, liquide, vagabond-sans-maître, je sursaute au débouché de mes absences, j'ai du mal à demeurer longtemps dans les méandres d'un paragraphe, rêveur terrible, chimérique affamé, contemplatif fatal au bord des phrases en suspens, les idées et les mots me déportent facile dans le brasillement de ces pluies que j'adore, dans les couleurs mourantes des bougainvillées, dans l'entrelacs de ces plantes-amies que j'arrose chaque jour, ou dans le vol géométrique des colibris. Petites merveilles. Vies minuscules extrêmes. Césaire s'étonnait que des corps aussi frêles puissent supporter sans exploser le pas de charge d'un coeur qui bat. Et c'est dans l'étonnant vrai. Le vol d'un colibri est un chahut d'immobilisations-éclairs. Ils dessinent dans leurs jeux (ou dans leurs luttes : comment savoir?) des géométries fulgurantes. Peu de courbes : des déplacements roides et des immobilisations en points d'exclamation qui ouvrent là-même à d'autres voltes rectilignes. Ils sont à moitié invisibles, en alerte définitive, vigilants et abandonnés à la maîtrise explosive de leurs ailes, d'une audace préoccupée et altière, l'intensité de leur vivre ressemble à la flambée d'un absolu. J'écris en leur présence, aussi près d'eux que cela m'est possible. Et mon esprit, qui ne peut les rejoindre, tente de les enrober dans ses brumes."
Patrick CHAMOISEAU, Ecrire en pays dominé.
09 juillet 2007
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1 commentaire:
"C'est du brutal !" Lino Ventura, Les Tontons Flingueurs.
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