30 novembre 2009

Désirade, ô serpente !

J'avais "rencontré" Fortuné Chalumeau, sans trop savoir qui il était, lors du Congrès des écrivains de la Caraïbe il y a un an. En furetant dans les rayons de la bibliothèque municipale de Trois-Rivières, j'ai vu un de ses livres, à la couverture colorée (à défaut d'être prometteuse...) et au titre énigmatique. Etant à la recherche d'auteurs guadeloupéens en particulier, je n'ai pas résisté à l'envie d'emprunter ce livre-là. Je n'ai pas trouvé grand chose concernant la biographie de Fortuné Chalumeau, hélas.

Tout de suite, en attaquant l'ouvrage, j'y ai vu la patte du Chamoiseau d'il y a quelques années et de Confiant, tant dans le style que dans l'histoire : un texte rempli de créolismes, à la verve rabelaisienne et sans concession dans les portraits de personnages brossés. Quant à l'histoire, une galerie de personnages habitant le même quartier (Texaco chez Chamoiseau, les Terres Sainville chez Confiant, l'île de la Désirade chez Chalumeau), ainsi que leur histoire, leurs interactions, leurs relations... le tout dans une atmosphère de tropiques arhumatisés. Ca, c'est pour la première partie, plaisante. Et puis, dans la deuxième partie et les parties suivantes, changement radical de décor et d'ambiance : Key West, un gendarme français se trouve à une réunion d'Interpol pour arrêter un trafic de drogues dans la Caraïbe. Nous voici donc à présent dans un polar international, dans lequel FBI, CIA, agents doubles et petites frappes ont la part belle. Un meurtre, une valise contenant des millions de dollars et des documents confidentiels disparue, et l'affaire est lancée. Elle trouvera son dénouement à la Désirade...

Il s'agit donc au final d'un livre qui, s'il n'a rien d'original ni dans son style ni dans sa narration, s'avère très agréable et prenant.

Hop, un extrait tout de go.

"Quoique charmoisé par la musique de la voix et la brûlante vénusté de sa vis-à-vis sur qui il lui arrivait d'encoller son grain d'yeux et ce, tout à la naissance de la confondante béance de son corsage, l'engin policier bien rodé qu'hébergeait l'inspecteur dans sa cabèche continuait d'officier et cela n'était pas rien. De sorte que, quand elle pausa pour s'accorder une revigorante respirée, il lui vint à l'esprit une charge de questionnements dont le plus pointu était : ce récit de magie est-il conte inventé pour me charmer, ou rien que pure vérité ? Ce à quoi elle accorda rien d'autre qu'un haussement d'épaules.
- Flora, reprit-il très vite. Vous permettez...? Avant de continuer et aussi de causer de Laura. Dites-moi : que savez-vous qui pourrait m'aider quant au meurtre de votre proche voisine ? Je suis persuadé que vous en savez plus long que vous en dites.
En un temps très court mais qui ne peut cependant se mesurer à l'échelle commune, s'alluma dans le grain de ses yeux une lueur toute pareille à celle d'un farfadet en farandole sur la caye mise à sec, face aux lames rageuses et enveloppantes de l'océan. Sans outre se démonter, elle glissa doucement :
- Si je savais quoi que ce soit, inspecteur, je vous le baillerais. Mais voyez-vous, cette île est ensorcelée - ne riez pas ! Il se passe des choses... Enfin, croyez-en mon conseil, oubliez la grosse Joliba et son assassineur, et que sa dépouille puisse festiner en paix avec les crabes du cimetière!
- Ce serait donc vrai, cette histoire à propos des crabes comestibles ? Ils se nourriraient de...
Elle partit d'un franc éclat de rire qui coupa la chique et le chouque au questionneur, tant la remarque autant que la tête d'icelui lui parurent ensemble désopilant."

3 commentaires:

Emrik a dit…

Ca a l'air chaud, Chalumeau...

Tessa a dit…

Et le congrès n'a plus lieu cette année? En cliquant sur ton lien, on n'accède plus à la page....

Matt a dit…

Alors, je ne sais pas quand aura lieu un deuxième Congrès... En tout cas, ce ne sera pas en Guadeloupe, il faut bien que chacun puisse l'organiser. Je me suis en effet aperçu que les liens ne marchent plus, pour la simple et bonne raison que le site ne semble plus exister...